La promulgation par le Président Mahamat Idriss Déby Itno, ce 8 octobre 2025, de la loi constitutionnelle révisant la Constitution de 2023, soulève de sérieuses préoccupations quant à l'avenir démocratique du Tchad. Si la révision apporte des changements structurels, les modifications fondamentales concernant les mandats électoraux sont perçues par de nombreux observateurs comme un glissement institutionnel vers l'autoritarisme consolidé.
Le changement le plus criant est sans doute l'allongement du mandat présidentiel à sept ans, renouvelable sans limitation.
Rupture Démocratique : Cette disposition retire le principal garde-fou contre l'accaparement du pouvoir. En supprimant toute limite au nombre de mandats, elle ouvre la voie à une présidence à vie de fait, sapant le principe d'alternance qui est la pierre angulaire de toute démocratie républicaine.
Renforcement du Clan : En prolongeant le cycle électoral présidentiel et en alignant le mandat des députés sur six ans, le texte semble davantage conçu pour pérenniser la domination du pouvoir en place que pour consolider la stabilité institutionnelle au service de la nation.
Des Réformes de façade ?
D'autres dispositions, bien que présentées comme des avancées, méritent une lecture prudente :
Le Vice-Premier Ministre : La création de ce poste est une manœuvre classique dans les régimes présidentiels forts. Elle pourrait servir de soupape de sécurité ou de levier de gestion politique sans réellement décentraliser le pouvoir exécutif.
Financement des Campagnes : La prévision du financement des campagnes électorales des partis est positive en théorie. Toutefois, son efficacité dépendra de sa transparence et de son équité ; sans une autorité de contrôle indépendante forte, cette mesure pourrait surtout bénéficier au parti dominant.
Jugement des Ministres par Tribunaux Ordinaires : Mettre fin à la justice d'exception pour les membres du gouvernement est une avancée vers l'égalité devant la loi. Cependant, l'effectivité de cette réforme sera conditionnée par l'indépendance réelle du pouvoir judiciaire vis-à-vis de l'exécutif, un enjeu persistant dans le contexte tchadien.
En fin, si la révision constitutionnelle est présentée comme une étape vers un Tchad renouvelé, le cœur des changements – la suppression des limites de mandat – en fait un texte fondamentalement orienté vers la concentration du pouvoir. Elle pose de sérieuses questions sur la sincérité de l'engagement des autorités à restaurer une véritable transition démocratique respectueuse de la volonté populaire et du principe de l'alternance.