Le président camerounais, Paul Biya, a mis fin au suspens en annonçant sa candidature à l'élection présidentielle du 12 octobre 2025. À l'âge vénérable de 92 ans, celui qui est déjà l'un des chefs d'État les plus anciens au monde brigue ainsi un huitième mandat, une décision qui, si elle est favorable par ses partisans, suscite une vive opposition et alimente les tensions dans un pays déjà secoué par des crises. La déclaration, concise, mise en avant "les résultats visibles et appréciables" de son action, tout en reconnaissant qu'il "reste beaucoup à faire".
Cette annonce intervient dans un climat politique et social particulièrement tendu. Si le président Biya évoque "un environnement international de plus en plus contraignant" et des "défis auxquels nous sommes confrontés" qu'il entend surmonter, un parti significatif de la population camerounaise perçoit cette candidature comme un signe de stagnation et de mépris des aspirations au changement.
L'âge du président, né en février 1933, est au cœur des critiques. De nombreux observateurs et citoyens s'interrogent ouvertement sur sa capacité physique et mentale à diriger un pays confronté à des défis complexes, qu'il s'agisse de la gestion économique, de la lutte contre la corruption endémique ou de la résolution des crises sécuritaires. Les apparitions publiques de Paul Biya sont rares, et des rumeurs persistantes sur son état de santé nourrissent le débat. Pour ses détracteurs, cette longévité au pouvoir, sans transition démocratique en vue, est un frein au développement et à l'émergence d'une nouvelle classe politique.
Par ailleurs, le Cameroun est toujours en proie à une crise sécuritaire majeure dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Les affrontements entre forces de sécurité et groupes séparatistes successifs de déchirer ces zones, entraînant des déplacements massifs de populations, des destructions et des pertes en vies humaines. Des émeutes, souvent liées à la frustration et au sentiment d'abandon, éclatent régulièrement dans ces régions. La déclaration de candidature de Paul Biya, qui se veut rassurante en promettant que « le meilleur reste à venir », ne semble pas apaiser les craintes ni répondre aux revendications profondes de ces populations. Au contraire, pour beaucoup, la persistance de cette crise est une preuve de l’échec de la gouvernance actuelle.
Le communiqué présidentiel insiste sur la « détermination » de Paul Biya à servir la nation et à assurer la sécurité et le bien-être des Camerounais. Il reconnaît que la situation des jeunes et des femmes est au cœur des priorités, mais l'écart entre ces promesses et la réalité vécue par une grande partie de la jeunesse, confrontée au chômage et au manque de perspectives, est criant.
Dans les jours à venir, cette candidature va sans doute intensifier le débat public et les mouvements d'opposition. La question de la légitimité d'un huitième mandat pour un président nonagénaire dans un pays aux prises avec de multiples crises sera au centre des discussions. L'examen du 12 octobre 2025 s'annonce donc comme un moment charnière pour le Cameroun, où les aspirations au changement se heurteront à la volonté de perpétuation du pouvoir en place.